C’était le titre d’un texte d’Huguette de Broqueville écrit après un voyage à Auschwitz-Birkenau. Il était organisé par le père Shoufani, arabe et palestinien, curé de Nazareth. Plus de 700 personnes, palestiniens, juifs, croyants ou non, se sont réunies dans ce camp de la mort, pour comprendre, pour ressentir, pour accepter l’indicible qui s’est déroulé à cet endroit.
Personne n’est sorti indemne de cette visite. A l’heure d’un nouvel embrasement entre israéliens et palestiniens, ce texte résonne étrangement. Gardons espoir que les faucons israéliens n’entament pas, eux-aussi, une marche lugubre vers une solution finale.
En espérant que « Rien ne pourra empêcher que cette union des cœurs et des volontés ait eu lieu sur la terre maudite d’Auschwitz. Elle est comme
une lumière au milieu de la haine et du sang« . Cette dernière phrase de son texte est un appel sans cesse répété pour l’instauration d’une paix réelle et définitive entre ces deux peuples.Actuellement, la paix s’éloigne à grande vitesse, un mur physique fait de béton sépare les deux camps, alors qu’un mur invisible de haine semble s’ériger définitivement entre juifs et musulmans.
Géry de Broqueville
Les ombres de la lumière
Texte de Huguette de Broqueville, paru dans la revue de l’association Charles Plisnier, Francophonie vivante, dont le thème est Feu et ombre. Revue trimestrielle n°4, décembre 2007, page 15.
L’essai, De la guerre de l’ombre aux ombres de la guerre, de
Laurence van Ypersele et Emmanuel Debruyne, m’a plongée dans la
guerre de 1940-1945 qui traverse mon propre livre Lydia, l’éclat de
l’inachevé, publié à Paris aux Éditions Michel de Maule.
Cette fiction est basée sur des documents authentiques de la
Résistance que Lydia, chef de secteur de l’ Armée Secrète, aurait dû
détruire, mais qu’ elle avait gardés au mépris de toute prudence. Des
extraits de ces documents paraissent en notes à la fin du roman ainsi
que quelques pages des « journaux de deux petites filles pendant la
guerre » qui éclairent les allées et venues de Lydia dans cette période
troublée. Continuer la lecture de « Les ombres de la lumière »
La Bibliotheca Alexandrina
Lors d’un voyage en décembre 2018, je suis allé à la Bibliotheca Alexandrina pour la visiter. Je n’y avais plus mis les pieds depuis l’année de sa fondation, en 2002. Il est évident que l’on ne doit pas confondre avec la Bibliothèque d’Alexandrie fondée en 288 AC et qui a été définitivement détruite entre 48 av. J.-C. et 642 de notre ère.
Qui dit bibliothèque dit livres qui peuvent être au nombre d’un million bien que seulement la moitié est présente dans les travées de la salle de lecture. Et parmi tous ces livres, un seul qui a été cosigné par Huguette de Broqueville dans le livre « Paris, trompe l’œil » de Sophie Masson.
En utilisant un des nombreux ordinateurs mis à disposition du public j’ai vu qu’il y en avait qu’un seul qui y est répertorié. S’il est à Alexandrie c’est parce que la Bibliothèque nationale de France (BNF) en a fait don.
Après vérification, si la BNF a fait un don à la Bibliotheca Alexandrina, c’est parce qu’il en avait deux exemplaires. Il en reste un à la BNF ! La vérification est faite sur le site Internet de l’institution. Comme Huguette a beaucoup publié en France, on peut constater qu’elle y est bien présente.
Géry de Broqueville
Cela fait 50 ans que l’on ne répond pas au crapaud
Ces jours-ci, l’on commémore le 50e anniversaire de la révolution de mai 68. qui s’est déroulée en France. Ce mois-là, la France a vacillé sur ses bases et le monde avec. Fini les Golden sixties, cette euphorie d’après-guerre. La jeunesse se révolte contre un ordre établi où la vie est de plus en plus réglementée, figée dans un béton tout gaullien, cette droite bien pensante.
J’étais gamin en mai 68 et un vent de révolte soufflait dans les cours de récréation. Je me souviens, nous jouions à « faire la révolution en érigeant des barrages dans la cours et nous crions envers les professeurs réprimandeurs : « CRS, SS » Continuer la lecture de « Cela fait 50 ans que l’on ne répond pas au crapaud »
Hommage à Huguette de Broqueville
Ce lundi 19 septembre 2016, un hommage a été rendu à Huguette de Broqueville par le PEN francophone de Belgique à la Maison de l’Association des Écrivains de Belgique (AEB) sous la présidence de Jean-Baptiste Baronian.
Pas moins d’une cinquantaine de personnes étaient présentes pour mettre en valeur les écrits d’Huguette. Incontestablement deux de ses romans, « Tentation » et « Lydia, l’éclat de l’inachevé » sont considérés, par beaucoup, comme les éléments relevant le sommet de son art : l’écriture.
Huguette de Broqueville était donc un grand écrivain au yeux de ses pairs. Les interventions de Jean-Baptiste Baronian (écrivain et académicien), de Claire-Anne Magnès (écrivain, philologue, chroniqueuse, traductrice, critique) et de Anne Richter (nouvelliste, essayiste, anthologiste) ont été remarquables. Cette dernière a fait un très beau travail de critique littéraire sur « Lydia, l’éclat de l’inachevé ». Son texte mériterait d’être publié tant la critique est belle. Continuer la lecture de « Hommage à Huguette de Broqueville »
Colloque « Les écrits de guerre »
Dans le cadre des Commémoration de la guerre 14-18, Huguette de Broqueville a organisé au Palais des Académies à Bruxelles le colloque consacré aux « Écrits de guerre« , en octobre 2014
Les indignations de la bécasse
Les indignations de la bécasse, Chronique du 21e siècle, aux éditions Michel de Maule (octobre 2011).
Lydia della Faille de Leverghem
De Lydia, j’ai un cahier daté de 1913 et deux de 1914, dont l’un serait une « copie » rédigée après coup à Londres, dans une optique de spleen. Lydia a également tenu un journal en 1939, le temps de la « drôle de guerre ».
J’ai choisi la relation au jour le jour de ce premier mois de la guerre en août 1914. La nécessité éditoriale m’a contrainte à de sérieuses coupes, notamment une étonnante chasse à deux espions dans le domaine. Le journal s’arrête début septembre lorsque la famille se réfugie en Angleterre. De ce séjour de quatre ans, il ne reste presque rien. Des souvenirs, certes, qu’elle racontait à ses enfants et un texte sur les réflecteurs à Londres. Sans doute, étant élève avec ses sœurs au Couvent du Sacré Cœur de Londres, le quotidien l’a-t-il accaparée.
Les écrits et les récits de Lydia ont servi mon roman Lydia, l’éclat de l’inachevé, paru en octobre 2007 chez Michel de Maule.
Extrait
Le 1er août 1914
Nous sommes 9 enfants : Marie-Antoinette (Nany a 16 ans, moi Lydia 15 ans, ensuite Edmond 14 ans, Alex 12 ans, Anne-Marie 10 ans, Cécile 8 ans, Harold 6 ans , André 3 ans Raoul 20 mois. Si nombreux ! Mais si heureux ! Que d’événements depuis le 29 septembre, où j’ai laissé mon journal. Les faits politiques aussi bien que ceux de notre famille me disposent à reprendre la plume – Je les transcrirai rapidement pour vous mettre au courant. Le premier événement est la vente de notre belle campagne, le Lackbors à Deurne où j’ai passé de si beaux jours, que je la regrette ! La seconde nouvelle est la déclaration de la guerre. Elle est imminente entre les puissances européennes.
Les moments littéraires, n° 21, – 1er semestre 2009
Tentation
Tentation, roman, aux éditions Michel de Maule, octobre 2009
Pour des raisons personnelles, Huguette de Broqueville avait d’abord choisi de publier ce roman en roumain (manière de pseudonyme : même nom, autre langue.) Au cas où elle déciderait de le publier en français, Pierre de Boisdeffre en avait suggéré la présentation :
Ce Beau texte, où il est question de la physique et de la métaphysique du sexe, surprendra plus d’un lecteur. Il est audacieux tout en ne dépassant pas certaines limites, et d’une rare originalité.
Audacieux, parce qu’Alexis – l’amant – est aussi impudique que pervers, poursuivant la conquête d’une femme inaccessible, Sophie, alors même qu’il entretient d’autres liaisons.
Original, parce que peu d’auteurs ont été aussi loin dans la recherche du plaisir et de « l’infinitude » humaine. Nous voyons les amants entrer dans la chambre, monter dans le lit, se caresser, se posséder, se détester.
Le roman, d’une grande virtuosité, nous promène entre Rennes, Paris, Florence et New-York. L’amant y prêche « la merveilleuse abjection, la jouissance absolue de l’obscène, la chute vertigineuse dans l’immonde » tandis que Sophie, « chaque matin, gémit après la chose immonde et délicieuse », mais écrit à l’amant : « Dieu t’aime puisque tu m’as rencontrée. »
Les personnages se découvrent à travers l’œil du lecteur. Nous sommes devant une tragédie au filon double : d’un côté une tragédie existentielle, de l’autre, une tragédie littéraire : dépendance vitale absolue des personnages qui se savent « potentiels éternels » livrés à ce « biodégradable » qu’est le lecteur.
Tentation pourrait bien être les Liaisons dangereuses de ce début du siècle. On y retrouve la même audace, la même rigueur, un fol orgueil qui se joue des règles et des normes.
Extraits
Vous si belle, hiératique… votre apparition, je voudrais donner à ce mot son sens religieux, iconique, oui, votre apparition au Cercle d’Orphée, noire, blanche de visage, émaciée, douloureuse, l’élégance de votre démarche si rare chez les femmes… je crains d’être grossier, aussi j’arrête là…, fragments qui me viennent à l’esprit, quand il dit ah, boire votre sexe jusqu’à plus soif ! Quand de son écriture âpre, il ouvre l’infini des profondeurs.
A tous les hommes j’offre mon rire. J’écoute, je ris, ne les crois pas. Ils espèrent, puis désespèrent. S’attaquent à des femmes plus faciles. Désir et orgueil mêlés, Alexis me veut. Il me veut, la belle affaire. Comme tous, il me veut, c’est le jeu. Je replie sa lettre. J’existe un peu plus. J’ignore que j’existe un peu plus. Dix ans d’appel violent. Moi, rien. Quelques formules de politesse. Merci d’avoir pensé à moi… amicalement. Il devenait fou, suppliait.
La bonne odeur des rides
L’homme quelconque fait des choses quelconques à longueur de journée, 16 heures de déambulation à l’intérieur de lui-même s’il est bureaucrate, à l’extérieur s’il est marchand ambulant. Les mille et minis actions tissent le tempo du jour que les rêves détricotent la nuit.
L’homme quelconque devient premier ministre. Il tient le pays à bras le corps. Dans le meilleur des cas, il passe son temps à penser aux démunis. Dans le pire des cas, il ne pense qu’à sa gloriole et les démunis s’évanouissent de son esprit. Le temps érode son pouvoir, il sera blackboulé aux prochaines élections.
L’homme quelconque se met à aimer. Le temps s’élargit, s’amplifie telle une montgolfière de bonheur et d’illusion qu’il chouchoute, que, pour rien au monde, il ne voudrait dégonfler dans un acte suicidaire. Il aime, il est immortel. Il étire le temps et martèle en lui le toujours de l’amour. Mais le temps dégonfle la montgolfière, crème de beauté, gymnastique, rien n’y fait, souriez, vous êtes filmés.
Sur terre, cependant, des petits vieux se donnent la main. Ils ont trouvés l’emploi du temps, la formule magique. Le temps n’a plus de prise sur leur amour. Ils parcourent la route vierge du temps. Ils aiment la bonne odeur de leurs rides.